Abattement DUTREIL : Quelles sont les délais de reprise de l’administration

La difficulté de cette question tient au caractère très particulier du dispositif DUTREIL qui étend ses obligations en amont et en aval de l’acte de donation lui-même sur des périodes vastes portant sur un grand nombre d’années, ce nombre étant variable selon les choix faits par les donateurs et les bénéficiaires. La détermination du point de départ de la prescription entre dans notre préoccupation.

La prescription normale (dite abrégée – comme s’il s’agissait d’une faveur…) échoit à l’expiration de la troisième année suivant celle de l’enregistrement de l’acte de donation.

Le BOFIP (BOI-CF-PGR-10-40) rappel qu’aux « termes de l’article L. 180 du LPF, le droit de reprise de l’administration peut s’exercer jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle au cours de laquelle l’exigibilité des droits a été suffisamment révélée par l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou par l’exécution de la formalité fusionnée sans qu’il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures. »

On voit donc que cette prescription « abrégée » peut très vite devenir « longue » si l’exigibilité des droits n’a pas été suffisamment révélée. A contrario si l’administration doit, dans le cadre de son contrôle, effectuer des recherches ultérieures pour déterminer si les conditions du dispositif de faveur seraient applicables, alors la prescription n’expire qu’au terme de la sixième année suivant celle du fait générateur de l’impôt.

Il faut donc que l’acte de donation ou la déclaration de succession soit suffisamment détaillée et justifiée pour que l’administration n’ai pas de recherches ultérieures à diligenter. Or il se trouve que dans la quasi-totalité des cas, des recherches complémentaires soient nécessaires. C’est le cas notamment de la situation des holdings animatrices puisque l’administration devra procéder à des investigations complémentaires qui dépasseront la simple lecture de l’acte de succession ou de donation : ne serait-ce que pour vérifier que l’activité d’animation est prépondérante ou que la société est bien opérationnelle ou encore qu’un dirigeant en exercice soit présent parmi les signataires de l’acte. Dans les groupes cela se complique par la démonstration du caractère animateur du holding qui nécessitera de vérifier que les filiales sont bien opérationnelles ; cette démonstration ne peut résulter que d’une analyse et une valorisation des actifs des bilans des filiales…

Dans les faits il s’avère, généralement, que la simple mention dans l’acte ne permet pas de constater, à sa seule lecture seule, l’applicabilité ou non de l’article 787 B du CGI .

Il faudrait, donc, pour que la prescription triennale soit applicable que les énonciations de l’acte ou de la déclaration de succession soient suffisamment explicites pour révéler que les conditions d’applications du dispositif de faveur ne sont pas réunies.

Dans le même souci il y a lieu de connaitre avec précision le point de départ du délai de prescription. Pour cela il faudrait que l’administration sache au moment où la réduction de droits serait applicable si le redevable remplira ou non ses engagements dans les temps impartis, ce qu’elle ne peut savoir au moment de l’acte.

Comme l’exercice de son pouvoir de contrôle pourrait, dans ces conditions, se trouver annihilé et en l’absence de texte spécifique comme de jurisprudence sur ce sujet, on pourrait imaginer extrapoler à partir d’autres dispositifs (comme les engagements de construire ou de vendre). Partant l’administration ne pourrait-elle pas considérer que la souscription d’un engagement de faire (comprenant donc la possibilité de ne pas faire) voit sa prescription suspendue à l’achèvement de la durée cet engagement ?

Et dans ce cas, le déroulement de la prescription ( possiblement une prescription de 6 ans) ne débuterait qu’à l’expiration du délai de l’engagement ou bien encore dans l’une ou l’autre des hypothèses suivantes :

  1. soit l’échéance de la plus longue des conditions ( généralement quatre années, sauf le cas d’engagement viager) ;
  2. soit l’intervention antérieure d’une cause de déchéance du bénéfice du régime de faveur.