Une cession d’actions à 1€ peut ne pas être une donation ni un acte anormal de gestion

(Conseil d’Etat, 8ème – 3ème chambres réunies,11 mars 2022, 453016)

Les faits

Une société consent à un cadre dirigeant d’une de ses filiales une promesse de vente d’actions de cette filiale moyennant un prix de 1 euro par action, prix non révisable.

Au moment où l’intéressé lève l’option la valeur vénale unitaire de chaque action est de 3.838 euros.

La société a-t-elle consenti au cadre dirigeant une libéralité constitutive d’un acte anormal de gestion ?

Autrement dit : la société a-t-elle agi conformément à son intérêt social, si on met en regard les avantages qu’elle pouvait attendre, pour elle-même, de l’implication du dirigeant et en raison de l’option d’achat qu’elle lui attribuait ?

La Société arguait qu’elle été tenue d’exécuter la cession au prix convenu et qu’elle avait pris cet engagement pour servir son intérêt propre. Que la volonté qu’elle affichait clairement était d’inciter le cadre concerné à développer le chiffre d’affaires, incitation d’autant plus marquée que l’augmentation du CA entrainerait une augmentation de la valeur de sa participation.

Position de l’Administration

La promesse de vente consentie au profit du dirigeant salarié de la filiale, n’aurait pas comporté, pour la société, de contrepartie suffisante.

Bien que ce dirigeant ne fût pas salarié de la Société Mère, la promesse n’était pas limitée par l’obligation d’être présent dans l’entreprise filiale pendant un délai minimum non plus que conditionnée à une durée minimale de conservation des titres.

De surcroit, il était prévisible que dès l’année de la conclusion de la promesse, la valeur des actions de la filiale serait bien supérieure au prix de la promesse.

En faveur de la Société, il y avait lieu de retenir que l’intéressé pouvait lever son option sans que cette levée soit conditionnée ou subordonnée à la réalisation préalable d’engagements de sa part.

Ajoutons que le prix de 1 euro était proche de la valeur vénale des titres au jour de la conclusion de la promesse et que les perspectives de croissance de l’activité de la société filiale n’avaient aucun caractère de certitude et qu’en conséquence cette promesse « était de nature à avoir, à l’égard de l’intéressé, un réel effet incitatif ».

Ainsi l’administration n’établissait pas que les contreparties retirées par la Société de la promesse de cession consentie au cadre dirigeant de sa filiale, seraient insuffisantes au regard de l’avantage consenti à ce dernier ; la Société n’a pas commis un acte anormal de gestion