Les redevances de concession de licence de marques et brevets ne sont pas la contrepartie d’un service rendu

Extrait de l’article 155 A du CGI

« I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières :

  • soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ;
  • soit, lorsqu’elles n’établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ;
  • soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l’article 238 A. »

Contexte légal :

L’article 155 A du CGI est un dispositif anti-abus qui prévoit, dans des cas limitativement énumérés, de soumettre à l’impôt la rémunération d’une prestation réalisée en France par une personne qui y est domiciliée ou établie, lorsque cette rémunération a été versée, aux fins d’éluder l’imposition, à une personne domiciliée ou établie à l’étranger.

Jurisprudence antérieure

Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 08/06/2020, 418962, Inédit au recueil Lebon

Extrait

  1. « En jugeant que les redevances versées pour l’utilisation des marques et logos exploités par la société D… International BV …..
    ….. ces redevances ne sont pas la contrepartie d’un service rendu…..
    la cour administrative d’appel de Lyon a commis une erreur de droit….
  2. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les redevances perçues par la société D… International BV pour l’utilisation des marques et logos cédés par M. A… D… ne peuvent être regardées comme la rémunération d’un service rendu par ce dernier et n’étaient dès lors pas imposables sur le fondement du I de l’article 155 A du code général des impôts, cité au point 3. Par suite, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes, M. B… D… est fondée à soutenir que c’est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Grenoble a refusé de faire droit aux demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles ont été assujettis d’une part, M. A… D…, au titre de l’année 1998 et de l’année 1999, pour la période du 1er janvier au 30 septembre, et d’autre part, M. A… D… et son épouse au titre de l’année 1999, pour la période du 1er octobre au 31 décembre, et au titre des années 2001, 2002 et 2003.
  3. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros à verser à M. B… D… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. »

Pour autant l’administration fiscale ne s’est pas avouée vaincue ; elle a réitéré et pour la seconde fois le Conseil d’Etat s’est à nouveau prononcé au fond en sa défaveur.

C‘est par un Arrêt du Conseil d’État du 5 novembre 2021, n° 433367, qu’il confirme cette position en rappelant que, dans les circonstances relevées,  l’administration fiscale ne pouvait faire application des dispositions de l’article 155 A du CGI.

Extrait :

« En statuant par ces motifs alors, d’une part, que les redevances versées en contrepartie de la concession du droit d’exploiter une licence de marques et brevets ne peuvent être regardées comme la contrepartie d’un service rendu au sens et pour l’application de l’article 155 A du code général des impôts et que, d’autre part, l’entretien, le renouvellement, l’extension des marques et brevets et, plus généralement, l’accomplissement des actes nécessaires au maintien de leur protection ne peuvent être regardés comme une activité dissociable de la concession même de ces licences de marques et brevets, la cour administrative d’appel de Paris a commis une erreur de droit et, par suite, inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis. M. et Mme O… sont donc fondés, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l’annulation de l’arrêt qu’ils attaquent. »